Nous vous invitons à entrer dans le monde d’un marchand toscan des XIVe-XVe siècles, dans son réseau de relations proches et lointaines, ses intérêts dispersés du Levant à la façade atlantique, à partir des vestiges de la communication épistolaire alors pratiquée par des citadins ordinaires, comme les marchands, les boutiquiers et les artisans. Ces documents sont préservés dans l’Archivio Datini de Prato, un fonds d’archives constitué autour d’une figure centrale, Francesco di Marco Datini (vers 1335-1410), né à Prato, formé à Florence puis à Avignon, où il séjourna de 1351 à 1383, avant de revenir s’établir à Florence et Prato.
Après avoir jeté les bases de sa fortune dans la capitale provisoire de la chrétienté occidentale autour d’une boutique d’armurier et de «mercier» (quincaillier), Francesco constitua un réseau d’agences reliant l’Italie centrale, la Ligurie, la Provence et la Catalogne tout en diversifiant ses investissements, de l’import-export de nombreuses denrées à la production et teinture de draps de laine et à la banque.
Démesuré par rapport aux archives marchandes ou plus généralement privées conservées pour la période, le fonds s’est peu à peu constitué à partir des agences et des papiers personnels du marchand, puis a été transmis par la fondation que Francesco Datini institua pour lui laisser son patrimoine. Il comprend environ 600 registres de comptabilités et autant de liasses de correspondances, qui constituent, avec quelque 150000 lettres, la plus importante collection de correspondances privées du monde pour la période préindustrielle. L’Archivio di Stato de Prato en assure la conservation et présente sur le site Datini on line les différentes séries, ainsi que la reproduction numérique de la majeure partie des lettres.
Comparées à d’autres sources de la période, ces correspondances sont d’une grande richesse par les aperçus qu’elles jettent sur les pratiques quotidiennes, les stratégies des individus au sein de leur sphère de relations et le ton même des rapports interpersonnels. Elles restent néanmoins encore peu familières aux historiens du fait de la rareté dans les dépôts de ce type de source, moins conservé dans la durée du fait de son usage éphémère. Nous souhaitons multiplier les accès à ce massif documentaire encore peu balisé en offrant ici, avec une présentation générale du fonds, de son histoire et de son contexte social, des exemples de textes épistolaires commentés, des corpus inédits de documents et divers instruments de recherche tels des tableaux de données linguistiques ou factuelles, une base de données prosopographiques et une bibliographie reclassable.
Différents parcours sont ainsi proposés : des fiches didactiques ; des documents isolés commentés et abordables aussi à travers une traduction ; d’autres replacés dans la profondeur d’une relation que le fonds a préservée ; enfin des informations détaillées, permettant de se pencher sur une biographie spécifique, de pallier en partie l’absence d’index cumulatifs dans les publications et les sites antérieurs, d’apporter des informations inédites et de jeter des passerelles vers d’autres archives conservées en Italie, en France ou au Vatican.